I) Généralités
Les mécanismes de contrôle de la température interne du corps sont plus développés pour lutter contre la chaleur que contre le froid.Les réactions de l'homme au froid sont surtout d'ordre comportemental comme l'augmentation de la prise alimentaire et le choix de vêtements chauds. Les mécanismes physiologiques sont plutôt structurés pour protéger d'abord le corps contre la chaleur.La zone de température compatible avec la vie est de 34 `C (température ralentissant le métabolisme et provoquant des troubles du rythme cardiaque) jusqu'à 45 °C .
L'homme est un animal qui vit à température quasi constante, il est donc un «homéotherme» devant s'adapter aux conditions environnantes sans changer sa température interne. Sur 100% d'énergie dépensée, 25% est sous forme d'énergie mécanique (c'est-à-dire le raccourcissement des myofilaments) et 75% l'est sous forme de chaleur contribuant alors à augmenter la température interne.
Cependant, il faut considérer que l'exercice en ambiance chaude et humide est la pire des contraintes imposée à l'organisme, pouvant réduire la performance de 10 à 15% pour un marathon se déroulant à 35 °C et à 80% d'hydrométrie (3 heures 20 min au lieu de 3 heures). Ainsi, la production de chaleur est très liée à l'intensité d'exercice.
Quels sont les mécanismes qui permettent d'éviter «l'hyperthermie»?
Cela revient à échanger sa propre chaleur avec le milieu ambiant. On comprend dès lors que, si le milieu environnant a une température supérieure à celle de son propre corps, l'élimination de la chaleur endogène (produite par notre propre organisme) sera alors rendue extrêmement difficile, les échanges de chaleur s'effectuant du point le plus chaud vers le point le moins chaud : on parle alors de «gradient» (différence) de température
II) Echanges de chaleur entre le corps et l’environnement externe
Ces échanges se font par la surface du corps, par la peau. Nous avons 4 moyens d'échanger la chaleur avec le milieu ambiant :
-La radiation ( ou rayonnement) : Les échanges thermiques se réalisent par rayonnement infrarouge. Ils consistent en un transfert de chaleur de la surface d'un objet vers un autre, sans aucun contact physique entre les deux corps; ainsi le soleil émet des rayons qui nous réchauffent à distance. Lorsque nous sommes au repos dans une ambiance confortable (température de 21 °C), 60% de nos pertes de chaleur se font par radiation. Nous réchauffons alors les objets environnants, les meubles de la pièce où nous sommes, mais aussi les murs, le plafond... Une perte de chaleur par radiation ne peut se réaliser que si l'environnement est plus froid que notre propre corps, ce qui est difficile sous un soleil de plomb ou dans une pièce surchauffée. Bronzer ou être performant il faut choisir!
- la conduction : La conduction est définie comme un transfert de chaleur entre deux corps, en contact cette fois-ci. Au contraire de la radiation, vous ne réchaufferez que les meubles que vous toucherez.
- la convection : La convection est une forme conductive d'échange de chaleur (et de matière) mais, parmi les deux corps échangeurs, il y a l'air et l'eau. En effet, la convection caractérise la chaleur échangée au contact d'un fluide par l'intermédiaire d'un courant d'air ou d'eau. Les échanges convectifs (par convection) sont d'autant plus importants que le gradient (la différence) de température entre le corps et l'air ou l'eau est grand, mais dépendra également de la vitesse de déplacement du fluide : courant d'air ou courant d'eau.
-L'évaporation : C'est la voie majeure de dissipation thermique chez l'homme. Nous savons que les animaux à poil, dépourvus de ce mécanisme, évacuent leur chaleur par la bouche, en hyperventilant très rapidement. L'homme élimine sa chaleur au repos pour 25% par évaporation, mais bien davantage lorsque lors d'un exercice accompli dans un air chaud, sous un soleil radieux, les possibilités de convection étant faibles.
L'évaporation est fondée sur le principe selon lequel chaque gramme de sueur ou d'eau sur la peau (dans le cas d'un épongeage dans une course à pied sur route) permet de dissiper 580 calories. Un litre de sueur évaporée, transpiration utile non ruisselante, permet d'éliminer quelque 580 kcalories, ce qui est appréciable mais va avoir pour corollaire un risque de déshydratation. L'évaporation dépend du gradient (de la différence) de la pression en vapeur d'eau entre le corps et l'air. Ainsi, l'évaporation de la sueur sur la peau va dépendre de trois facteurs :
- de la température et de l'humidité relatives
- des courants convectifs entourant le corps
- de l'importance de la surface de la peau exposée à l'environnement.
Dans un environnement très chaud, l'humidité relative est le facteur le plus important déterminant la quantité de chaleur éliminée par l'évaporation de la sueur. 100% d'humidité dans l'air est synonyme de quasi-impossibilité d'évaporer sa sueur. Il est important de comprendre que ce n'est pas la sueur qui refroidit la peau, mais bien son évaporation. Une sueur ruisselante est parfaitement inutile puisqu'elle n'est pas évaporée; la sueur utile est donc bien celle qui ne se voit pas. Il ne faut cependant pas oublier de compenser les pertes hydriques dues à cette discrète mais néanmoins réelle perte d'eau.
III) Régulation de la température
Le rôle de la thermorégulation est de maintenir la température du « noyau interne» à une valeur proche de 37 °C, celle-ci étant la référence pour le thermostat de l'organisme.
L'hypothalamus antérieur est le premier centre de régulation de la température interne. C'est dans l'hypothalamus en effet, que sont situés les récepteurs sensibles à la température (thermorécepteurs) qui enregistrent la température du noyau central. L'hypothalamus reçoit des informations complémentaires des thermorécepteurs de la peau etde la moelle épinière. Dans les centres thermorégulateurs de l'hypothalamus, la température effective du corps (valeur réelle) est comparée à la valeur de consigne. S'il existe une différence, l'organisme met en oeuvre plusieurs mécanismes de régulation du bilan thermique.
Si la température augmente au-dessus de la valeur de consigne, dans le cas d'un exercice physique par exemple, apparaissent une série de réactions physiologiques :
-Stimulation des glandes sudiropales qui vont favoriser le mécanisme de perte de chaleur par évaporation
-augmentation du débit sanguin cutané permettant au flux sanguin « surchauffé » d’aller se refroidir au niveau de la peau
Lorsque la température revient à sa valeur de repos, ces deux mécanismes cessent.
IV) Acclimatation à la chaleur
L'entraînement en milieu chaud permet une série d'ajustements physiologiques qui vont atténuer le stress dû à la chaleur. Pour habituer l'organisme à la chaleur, il importe déjà de s'entraîner à une intensité d'exercice induisant une surcharge thermique, soit une intensité d'au moins 50% de la consommation maximale d'oxygène . Les adaptations qui apparaissent lors de l'acclimatation à la chaleur sont :
1) l'augmentation de volume plasmatique Cet accroissement permet de maintenir la pression sanguine et le volume d'éjection systolique sans nécessiter l'augmentation du débitcardiaque par la fréquence cardiaque.
2) le déclenchement plus rapide du seuil de sudation au début d'un exercice, diminuant ainsi le stockage initial de chaleur;
3) l'augmentation du débit sudoral par trois pour la même charge relative d'exercice
4) la diminution de la concentration de la sueur en sels minéraux et notamment en sodium et chlore, ceci grâce à «l'hormone» aldostérone qui permet la réabsorption du sodium au niveau du rein.
Quoi qu'il en soit, afin de prévenir le «coup de chaleur», symptôme de l'augmentation de la température interne, en vertu de ce débit sudoral augmenté, il est conseillé de boire tous les quarts d'heure, l'équivalent de 20 cl de boisson «isotonique», c'est-à-dire ayant la même concentration que le plasma sanguin, une boisson trop concentrée risquant au contraire de déshydrater l'organisme en raison d'un appel d'eau des cellules vers l'estomac selon la loi du gradient de concentration qui fait que les liquides se déplacent toujours des milieux les plus hydratés vers les moins hydratés
Une étude de Candas et al. (1986) a montré l'efficacité d'une boisson isotonique sur l'endurance (temps de maintien d'une intensité donnée). L'importance de l'hydratation pourrait être soulignée en donnant seulement le rapport illustrant la baisse de la performance et la perte hydrique : 2% du poids de corps perdu par la déshydratation entraîne une diminution de 20 % de la performance définie comme le temps soutenu à une intensité donnée, ceci pour les exercices de plus de 30 minutes.
Il est utile de mouiller légèrement et régulièrement bras et jambes, ainsi que le visage et la nuque pour faire descendre la température corporelle, favoriser l’évaporation et soulager ainsi la transpiration. L’équipement textile est essentiel, il doit permettre l’évaporation de la transpiration, ne pas entraver la convection et protéger des radiations solaires. Sa couleur doit être blanche ou claire afin de réfléchir le rayonnement solaire. Il faut un textile en fibres respirant-aérées, à manches courtes ( débardeur en fibres synthétiques) .Le port d’une casquette équipée d’un protège nuque est envisageable. Si vous n’avez aucune compétition en vue, évitez de courir au-delà de 30°C , les mécanismes de thermorégulation sont très sollicités avec ces températures et l’organisme pourrait souffrir.
En conclusion je finirai ce dossier par une question de Dominique qui lors de son marathon a eu sa fréquence cardiaque augmentée alors que sa vitesse était inférieure à son allure de « croisière » et demandait la cause de cette situation .
Pendant un exercice de longue durée (1 heure et plus) donc réalisé à une intensité inférieure à celle du début d'accumulation lactique, le débit cardiaque est stable. Cependant, le volume d'éjection systolique diminue en raison de l'augmentation de la température interne du corps (40 °C à la fin d'un marathon couru à 25 °C est une température couramment rencontrée chez les coureurs). Cette augmentation de la température interne provoque une dérive du débit sanguin vers la peau avec en plus une baisse du volume plasmatique due à la déshydratation.
Ce processus contribue à diminuer le retour veineux vers le coeur, ce qui va effectivement réduire le volume d'éjection systolique. Pour faire face à la demande métabolique qui ne diminue pas au cours d'une épreuve à vitesse constante, le débit cardiaque est maintenu constant grâce à l'augmentation de la fréquence cardiaque. Ainsi une course sollicitant un débit cardiaque de 15 I/min pendant l h30 avec une fréquence cardiaque de 130 bpm à la 30e minute va se terminer avec un débit cardiaque toujours égal à 15 I/min, mais avec une fréquence cardiaque de 160 bpm . Un marathon se termine souvent à une fréquence cardiaque proche de la fréquence cardiaque maximale (FC max) alors que la vitesse n'est que de 75-80%, de VOzmax dans les deux derniers kilomètres, sauf pour les sportifs de très haut niveau qui arrivent à conserver leur vitesse de course tout au long de l'épreuve (mais il faut remarquer qu'ils ne courent «que» 2h07 contre 3h00 et plus pour le coureur de loisir).
Bibliographie : Physiologie et méthodologie de l’entraînement –Véronique BILLAT